DE JODE, Gerard & Cornelis
Speculum orbis Terrae
Antwerp, Arnold Coninx for the widow and heirs, 1593
- Dimensions: 42 x 30 cm
- Description de l'état: Très bon
Description
Deux parties en un volume in-folio ; vélin doré de l’époque, titre, auteur et date manuscrits sur le dos, tranches dorées. Ouvrage monté sur onglets. Petites restaurations et légères rousseurs aux feuillets liminaires, très légers défauts (quelques petites taches, deux cartes et une planche imprimées légèrement de travers avec petite perte d’image sur la bordure), trous de vers à la première page de garde garde (contreplat), légère mouillure angulaire à qq ff. liminaires.
Le volume se compose d’un index manuscrit avec en haut “IHS Speculum orbis terre”, [11] ff. (dédicace, Introductio mathematica…) illustrés de 5 diagrammes gravés et d’un tableau gravé sur bois, 2 titres allégoriques gravés, 109 cartes sur 83 doubles feuilles, 2 planches gravées à double page par Anton Wierix (dignitaires du Saint Empire romain germanique), [3] pp. (autorisation et colophon du censeur, Catalogus auctorum, Index tabularum). Texte en latin.
Édition révisée et augmentée du Speculum de Jode, l’un des atlas les plus rares du XVIe siècle.
Gerard de Jode (1521-1591), cartographe flamand de renom, commence sa carrière comme imprimeur et graveur à Anvers vers 1550. Bien qu’il ait produit et vendu de nombreuses cartes, il est surtout célèbre pour son Speculum Orbis Terrarum, un atlas en deux parties publié en 1578, enrichi de descriptions de l’érudit allemand Daniel Cellarius. Pour cet ouvrage ambitieux, de Jode rassemble un vaste ensemble de cartes italiennes, allemandes et flamandes, gravant certaines lui-même, tandis que les frères Jan et Lucas van Doetecum réalisent la majorité des gravures.
Rival de son contemporain Abraham Ortelius (1527-1598), de Jode rencontre des obstacles dans la publication de son Speculum, très probablement dus aux efforts d’Ortelius pour préserver l’hégémonie de son propre atlas, le Theatrum Orbis Terrarum (1570) régulièrement augmenté tout au long de la décennie (et après). Bien que vraisemblablement achevé dès 1573, le Speculum n’obtient la permission royale qu’en 1577, et sa sortie en 1578 ne rencontre qu’un succès limité, en partie à cause de l’immense popularité commerciale de l’atlas d’Ortelius.
Face à ce succès écrasant, de Jode entreprend une version revue et enrichie de son atlas. Après sa mort en 1591, sa veuve et son fils Cornelis (1568-1600) poursuivent l’œuvre. Cornelis y ajoute dix nouvelles cartes, dont une mappemonde, des cartes de l’Amérique du Nord, de la Chine, de l’Australie et de l’Alaska, et réédite l’atlas sous le titre Speculum Orbis Terrae en 1593. Cette édition, publiée à Anvers par Arnold Coninx, se distingue par de nouvelles cartes, certaines révisées, et par de somptueuses pages de titre gravées.
Parmi les cartes notables de cette édition figurent deux nouvelles mappemondes. L’une d’elles, Haemispheriu Ab Aequinoctiali Linea, est considérée comme une des plus rares et des plus remarquables du XVIe siècle et de tous les temps. Cette mappemonde à projection bipolaire d’une grande beauté esthétique, sans mention d’auteur ni d’éditeur est, souligne Shirley, inspirée de la mappemonde de Guillaume Postel de 1581 et d’un ensemble de fuseaux anonymes probablement publiés à Anvers vers 1587 (Shirley 184). La seconde, Totius Orbis Cogniti Universalis Descriptio, est basée sur la projection rectangulaire généralement attribuée à Marinus de Tyr, agrémentée dans les coins, de deux petites cartes figurant hémisphères occidental et oriental sur la base de la projection circulaire de Roger Bacon. Elle a été réalisée en novembre 1589 à l’Académie de Douai, par Cornelis de Jode (Shirley 165).
L’atlas contient également des cartes fascinantes d’Amérique, dont Americae pars Borealis et Quiverae Regni, qui s’appuient sur la carte du monde en 18 feuilles de Petrus Plancius (1592) pour le contour de l’Amérique du Nord. Americae pars Borealis est en premier état – avec le nom de Laudonnière dans la légende au-dessus du cercle polaire. La carte en une seule feuille Quiverae Regni est l’une des deux cartes fondamentales du Pacifique. C’est la première carte publiée consacrée aux côtes ouest et nord-ouest de l’Amérique du Nord, y compris l’Alaska (depuis le dessous du Tropique du Cancer jusqu’au Pôle Nord, au bord supérieur de la carte). Ces deux cartes sont très rares. (Burden 81-82). Sur la même double page se trouve la carte en une seule feuille Novae Guineae forma, & situs considérée comme la première carte imprimée de l’Australie. Bien que cette carte porte le titre “Nouvelle-Guinée” et montre également les îles Salomon, toute la moitié inférieure de la carte représente une côte nord de l’Australie entièrement imaginaire illustrée de vignettes représentant un indigène avec un arc et des flèches attaquant un gryphon, un serpent et un lion. (Tooley, Mapping of Australia, 385). Tous deux sont rares, avec un seul état connu.
Il convient de noter les deux cartes de la Chine et de l’Arabie : China Regnum première et unique édition centrée sur la Chine, une partie du Japon, la Corée, Taïwan et la partie nord des Philippines, est basée sur le travail du Portugais Jorge de Barbuda, dont la carte de la Chine est apparue dans l’édition 1584 du Theatrum d’Ortelius ; cette carte occidentale très rare et précoce est seulement la deuxième carte de la Chine imprimée en Europe. – Secundae Partis Asiae centrée sur le Moyen-Orient est basée sur celle de Giacomo Gastaldi de 1561 et a été préparée par Gerard de Jode pour son édition du Speculum de 1578.
Lorsque Cornelis de Jode décède en 1600, l’éditeur anversois Joan Baptista Vrients acquiert les plaques de cuivre du Speculum ainsi que celles du Theatrum d’Ortelius, limitant ainsi toute réédition du Speculum. Après la mort de Vrients en 1612, les plaques passent aux mains de Jan Moretus.
Considéré comme l’un des chefs-d’œuvre de la cartographie européenne du XVIe siècle, le Speculum est aussi rare que précieux. Il ne reste aujourd’hui qu’une poignée d’exemplaires, renforçant son statut d’ouvrage mythique. Seuls quelques exemplaires ont survécu, une douzaine pour la première édition, un peu plus pour la seconde. “Les deux éditions du ‘Speculum’ sont d’une grande rareté. Van Ortroy ne connaissait de la seconde édition que 14 exemplaires” (Skelton, Introduction aux éditions en fac-similé).
Les spécialistes s’accordent à dire que de nombreuses cartes de de Jode surpassent celles d’Ortelius, tant par leur précision que par leur qualité artistique.
Provenance : Inscription de propriété au bas de la page de titre ex Bibliotheca Prim d Federici 1600.
Références : Van der Krogt 32:02B (titres 32:2A et 32:2B) ; Koeman II, Jod 2 ; Shirley, The mapping of the world, 165,184 ; Burden, The mapping of America,81,82 ; Symour, L. Schwartz, Ehrenberg, The mapping of America, pp. 78-79 ; Norwich, Maps of Africa 19 ; Tooley, Dictionnary of mapmakers II, p. 441 ; Tooley, Mapping of Australia, ; Tooley, Arabia in early maps, 38 (1st ed.) ; Koeman, Schilder, van Egmond, van der Krogt, HOC, vol. 3 part 2, Commercial Cartography and Map Production in the Low Countries, 1500 – ca. 1672, pp. 1321-1323 ; Ortroy, Fern van, L’oeuvre cartographique de Gerard et de Corneille de Jode, Gand 1914, 82-121.
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